154 – Respirer

L’odeur, on s’habitue. Très vite, on ne sent plus. Il y a un fonds de camphre, comme un relent de mauvaise digestion, et un soupçon de vieille transpiration. Rien d’agréable. C’est l’odeur de la couardise, de la fuite en silence, de l’absence d’honneur.

Pas vraiment une odeur de pourriture, ou peut-être un début de gangrène. Même ça, on s’habitue. Une décomposition en cours. Au tout début, c’était frais et floral : on a fait confiance mais laissez trop longtemps le bouquet dans le vase, l’eau devient verdâtre. Un cloaque, une bouillie de tiges à demi fondues : c’est répugnant.

Ça rappelle la couche-culotte trop pleine des mauvais jours. Quand il fallait mettre les mains dedans.

L’air frais, c’est une promesse qui n’a pas été tenue. Le vent a tourné. La défiance, le mépris, l’incompétence… pas tout à fait appétissant. Des fragrances métalliques, corrosives. Du plastique brûlé, des vieux pneus, le rance.

L’odeur, on s’habitue. C’est le renfermé de la chambre d’adolescent, le vestiaire après le match, la vieille paire de pompes.

Il suffirait d’aérer. De nettoyer. D’un minimum d’hygiène. Un peu d’eau de Cologne, du talc. Et les fesses propres du nouveau-né seraient prêtes pour une nouvelle aventure.

Mais on s’habitue. Ça pue, mais tout semble normal.

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