Le bonheur, qu’est-ce que l’on peut vouloir d’autre ? Un pavillon, une femme, des enfants, un chien, une piscine peut-être, et des amis qui vous envoient du courrier. Le facteur est sympa : il fait presque partie de la famille. Il n’y a qu’un truc qui m’énerve. Un seul. Et plus les années passent, plus ça aura été insupportable. Ils n’ont pas voulu comprendre. J’ai été patient. Très patient. Trop patient. Personne n’aurait été aussi patient que moi. Alors oui, je les ai noyés, un par un, dans la piscine toute neuve. Et le chien aussi, et même le facteur avec son sourire niais. Je n’en pouvais plus, et j’ai respiré lorsque j’ai vu leurs corps à la surface. Enfin. Enfin seul à la table du petit déjeuner, et, enfin, le pot de Ricoré posé dans le bon sens. Couvercle en haut.
Un bol de Ricore le matin est devenu un plaisir tardif. Je préfère ce mélange de café et de chicon, au simple café. Il m’évoque une tradition provinciale assise sur une longue expérience. Je peux y tremper le pain un peu durcie de la veille que je tartine soigneusement de beurre recouvert de confiture maison. La journée se présente bien, je suis prêt à produire mon commentaire sur le carnet de note : j’ai un bonheur moins compliqué que celui de Laurent. Je prend soin de mon facteur en étant abonné à un quotidien ce qui l’oblige à s’arrêter à ma boite à lettre.