El Dedischado est aujourd'hui bien plus qu'un poème célèbre de Nerval : c'est un terrain de jeu pour amateurs de détournements et de contraintes littéraires. A tel point que sortit en 2002 sous la signature, collective, de Camille Abacar un merveilleux livre, malheureusement aujourd'hui indisponible : Je suis le ténébreux : 101 avatars de Nerval (éditions Quintette). Il s'agit d'une collection de 100 variations plus créatives les unes que les autres autout du sonnet initial.
On trouve toujours en ligne un certain nombre de ces oeuvres, et quelques autres, sur ce site. J'y apportais d'ailleurs un temps modestement ma pierre (ici, par exemple).
Il est donc assez naturel d'appliquer au Dedischado un traitement qu'on ne lui avait pas encore, je crois, fait subir, en le truffant du maximum de zeugmes possible. Ma proposition en ce sens, la voilà, mais d'aucuns des nombreux participants à l'aventure des avatars de Nerval pourra peut-être aller plus loin encore : j'ai voulu, cette fois, rester près de l'original.
Je suis le Ténébreux, – Levé, -l'Inconsolé
Le Prince d'Aquitaine et des amours polies
Ma seule Etoile est morte, -et mon luth constellé
Porte le Soleil noir et ses chaînes jolies
Dans la nuit du Tombeau, Toi qui m’as consolé,
Rends-moi la vie facile et la mer d’Italie,
La fleur qui plaisait tant à mon cœur désolé,
Et la monnaie qu'on doit à la grosse salie.
Suis-je Amour ou perdu ?… Besognant ou Piron ?
Mon front est rouge encor et baissé sur la Reine ;
J’ai rêvé dans la Grotte où nage la sirène…
Et j’ai deux fois vainqueur traversé l’Achéron :
Modulant tour à tour sur la lyre d’Orphée
Les soupirs de la Sainte et les choix du budget.