Abonnez-vous à la lettre d'information

Chaque mois, cinq idées pour améliorer votre créativité éditoriale

368 – Correspondance 16

Correspondance sans correspondante. Lettres en poste restante. Missive to miss. Je ne sais pas si c’est une nouvelle série. Mais je t’écris. Peut-être que tu te reconnaîtras, si tu existes ailleurs que dans ces lettres.

Tu,

Tu t’estompes. Tu te transparences. Tu t’étioles. Tu t’évapores et te désassembles. Tu te bruit blanc. Tu te silence. Tu te fantôme. Forme spectrale. Évanescence.

Tu ne disparais pas. Tu n’as jamais été aussi présente. Tu es partout simultanée. Dans chaque émotion. Dans la saveur coco, dans la mangue, dans la menthe, dans le parfum floral du riz, dans l’eau de rose et le jasmin. Tu es l’effluve à peine reconnaissable, la fraîcheur de l’air, la poussière dans la lumière.

Tu ne disparais pas. Le temps te dilue en toute chose. Tu es partout autour de moi. Je te respire. Tu es dans la poignée métallique de la porte, dans la plainte de la ventilation, dans le rayon de soleil à travers les persiennes.

Où que je regarde, je te devine. Tu es la joie qui repeint les façades, le bonheur qui donne du sens à l’absurdité, la certitude qui aide à s’affranchir du doute, le doute qui permet d’avancer.

Si tu existes, alors tout ceci a du sens. Que tu sois vapeur, souvenir, reflet n’y change rien. Ce que tu es suffit à rendre le monde supportable. Tu es la brume d’argent qui donne aux plus ternes reliefs l’éclat qui les sauve.

Tu colores le terne et donne du goût à l’insipide. Tu sucres la rosée du matin et rends le monde comestible.

Qu’importent les catastrophes, les humiliations, l’inconfort : avoir croisé ta route suffit à donner du sens à l’effondrement.

Un monde dont tu fais partie : il n’y a pas besoin d’en dire ni d’en savoir plus. Lorsque je ferme les yeux et que j’inspire, j’échappe au désespoir.

Tu vois, tout ceci n’aura pas été vain. Tu es là. Tu es partout. Je peux sereinement attendre que cela finisse.

S.

Retour en haut