Journal – 10

28/12/21
Lecture en cours : Faillir être flingué de Céline Minard (Rivages). Après tout le monde, le livre date de 2013. Mais souvenir d’avoir lu du bien lors de sa sortie, le roman a été primé, et que Céline Minard se frotte aux littératures de genre avec bonheur. Ici, le western. Il y faut de grand espace, l’esprit des pionniers, la lenteur des déplacements d’avant le chemin de fer. On dit le chemin de fer, toujours, lorsqu’on parle de la conquête de l’ouest. Jamais le train. Car l’enjeu ce sont les rails, pas les wagons. Bref, plongée dans une galerie de personnages et une atmosphère, une faune, une flore et des horizons. C’est plus que maîtrisé, c’est plus qu’une démonstration. On y est.

29/12/21
Trouvé dans une bouquinerie un exemplaire un peu défraichi de mon tout premier livre, en bas d’une étagère, tout au fond d’un rayon. Il date de 1995, parle de multimédia, et, à vrai dire, ne vaut plus grand-chose aujourd’hui. D’ailleurs, il est proposé à 20 centimes. Il me faut moins de trois minutes pour l’ouvrir et ajouter sur la page de titre une dédicace. Une dédicace manuscrite, signée, une dédicace de 2021. Et j’ai reposé le livre dans le rayon. Il ne faut toujours pas plus de 20 centimes. Peut-être qu’il trouvera un jour un acheteur, même si j’en doute, et cela m’amuse beaucoup. La première fois que j’ai vu ce livre, c’était par piles entières, sur une table, dans la grande librairie Virgin des Champs-Elysées à Paris. Et c’est aussi l’histoire de ce qu’on peut croire un instant être et de ce qu’on devient.

30/12/21
Réclusion. État de qui vit isolé du monde. Isolement, éloignement, retraite. Solitude. Esseulement. Si seulement… Les synonymes, tout le champ lexical qui pointe vers la condamnation, la prison, le jugement, la faute. La perpétuité. Au mieux, la malchance des Robinson échoués. Mais ici encore trouver dans les pages des livres l’expression du châtiment divin. Falloir chercher loin les ermites volontaires, les carmélites éblouissantes, les repliés sur eux-mêmes heureux. Les introvertis épanouis.

31/12/21
Décision prise de rendre à nouveau disponible mon roman Mum Poher. Je mets en ligne une nouvelle édition. Le plus simple, le plus rapide, c’est encore Amazon. Format papier, format électronique. L’important, pour moi, que le livre soit disponible. Je n’attends rien de particulier de cette mise à disposition. Mais que le livre existe. Il s’en vendra sans doute peu, et ce n’est pas très grave. Mais j’ai revu le texte, corrigé quelques coquilles, arrangé un peu la présentation pour gagner en lisibilité. Reste une question, est-ce que je propose le livre en vente directe ? Pour qui ne voudrait pas passer par le grand méchant Amazon ? Très simple de mettre en place une page de vente sur mon site. Je serais juste un peu plus cher, avec les frais d’envoi. C’est de la tambouille ? Mais écrire, c’est ça aussi : publier, distribuer, et se poser toutes ces questions…

1/1/22
Toutes proportions gardées. Trouver dans Pour que tu ne te perdes pas dans le quartier de Patrick Modiano, une explication sur l’écriture de roman. Le héros est écrivain et explique comment il a enlevé le premier, et le deuxième, chapitre de son premier livre après l’écriture et que ces chapitres n’étaient nécessaires qu’à lui et qu’il les a coupés comme on retire un échafaudage après les travaux. C’est exactement ce que j’ai finalement fait pour Mum Poher. Décider, après les premières lectures d’effacer purement et simplement un premier chapitre d’exposition qui n’avait d’utilité que pour me lancer. Et combien de fois je dis aux stagiaires, aux étudiants : ne vous préoccupez pas de la première phrase, vous l’enlèverez après.

2/1/22
Le dispositif est trouvé pour un projet d’écriture quotidienne sur l’année. Chaque jour une image, un prénom, un texte : c’est le Catalogue 2022. Une forme de recul sur l’humanité et la consommation, ce qui fait ce que nous sommes, la somme de ce que nous achetons. Un projet de textes courts, quotidiens, qui s’appuient sur les promotions du moment de la grande distribution. Ces histoires de supermarchés me fascinent un peu. Souvenir d’une fenêtre de l’enfance qui donnait sur la grande surface au loin… Peut-être. Et puis ces catalogues papier qui vendent du rêve pour pas cher. Comme les catalogues de jouets de Noël. Toujours ce goût d’enfance. J’y découpe ce que je n’achèterai pas, et j’en fais du texte. C’est en soi un projet qui vaut d’être tenté.

3/1/22
Assumer une position celle de l’écrivain. J’ai toujours considéré que c’était un qualificatif qui ne venait que de l’extérieur. J’écris et, un jour, on me considère comme écrivain. Ou pas. Je ne sais pas si c’est une variante littéraire du syndrome de l’imposteur. Et puis, hier, un article titre : “Un écrivain de Rouen animera un atelier d’écriture autour du parfum, ouvert à tous”. L’”écrivain de Rouen”, c’est moi. Je ne me trouve pas plus légitime à endosser le costume même si c’est écrit en grosses lettres sur un site de presse. Animer un atelier d’écriture sur le parfum au cœur d’une pandémie qui prive d’odorat des dizaines de milliers de personnes. C’est en tout cas une idée formidable, non ?

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