Mes initiales dans le coin des mouchoirs. Je les ai toujours et ne les utilise jamais. Qui utilise encore des mouchoirs en tissus. Ma grand-mère y avait brodé, comme on faisait avant elle, le A de mon prénom, la première lettre de mon nom. Elle avait coupé le fil ocre avec les petits ciseaux qui me ravissaient, enfant : je n’avais pas le droit d’y toucher, trop précieux, rapportés de Nogent par la mère de ma grand-mère et c’est ma sœur qui en héritera. Cette cigogne ciselée c’était presque un jouet, presque un bijou, à peine un outil. Ma grand-mère ne brode plus, mais il y a dans ses armoires quelques nappes blanches rehaussées de roses et de tulipes, des dizaines de napperons et des serviettes de table assorties dont elle est fière et qu’elle sort parfois d’une main tremblante pour nous montrer ce qu’elle était capable de faire.
Maintenant j’attends avec impatience ce nouvel e-mail du matin.
Je me fais couler un café et m’assois devant mon ordinateur.
Occasion de me dégourdir le cerveau en improvisant un petit texte, comme un pianiste fait ses gammes pour se dégourdir les doigts.
Comme un alcoolique prend son premier verre, un fumeur aspire sa première cigarette, un gymnaste fait ses premiers étirements, un tueur nettoie son arme, un boulanger boit un grand verre d’eau après sa première fournée.
Vite prise une nouvelle habitude!