J’aime les choses qui s’alignent, les coïncidences, les hasards, les clins d’yeux. Ma rencontre avec Shena Mackay en est pleine ; alors je vous raconte. D’abord, qui est Shena Mackay ? Une autrice écossaise. Pas vraiment connue en France : seul ses deux premiers romans ont été traduits, chez Gallimard, dans la collection Du monde entier, mais c’était en 1968, le 29 mars, exactement. La veille de ma naissance.
Deux romans en un seul livre qui a la particularité d’être lisible dans les deux sens : un roman de chaque côté, tête-bêche. Tant et si bien que quelqu’un vous voyant en lire un vous imagine tenant le livre à l’envers. Aucun indice : une couverture de chaque côté. C’était avant l’ISBN, les codes barre, le prix au dos des livres. Et ce livre, donc, n’a pas de quatrième de couverture, mais deux couvertures.
J’ignore s’il y a eu beaucoup de livres de ce genre. Cette présentation avec deux couvertures respecte en effet la publication originale de 1964, ce n’est donc pas une lubie de Gallimard, mais une marque de respect pour l’édition originale. Un achevé d’imprimé, identique, de chaque côté, avec le même numéro d’édition. Ce me semble une curiosité bibliophilique, mais peut-être y en a-t-il eu plusieurs, ou même beaucoup dans ce cas. N’hésitez pas à les signaler en commentaire.
D’un côté, donc Le Marmot a pris le large, l’histoire d’un nain accablé de malchance, de l’autre Eugène n’est plus que poussière. Des romans étranges, comme parcellaires, des narrations auxquelles il semble manquer des chapitres, mais une atmosphère, un style. Et cela doit sans doute à la traduction d’Yvonne Davet, connue pour avoir été la secrétaire d’André Gide (qui décidément me poursuit ces jours-ci).
Shena Mackay a continué à produire, en Grande-Bretagne, avec un certain succès. Sans doute cette première édition en France n’a pas rencontré de succès malgré la forme particulière du livre. On trouve un long portrait d’elle dans The Guardian, en 1999.
Pour l’anecdote, mon exemplaire est un service de presse. Les lettre SP sont découpée dans la couverture, comme au poinçon, côté « Eugène ». Il était comme neuf, 52 ans après sa parution. Pas sûr que le journaliste auquel il était destiné l’ait ouvert.
Comment je suis tombé sur cette curiosité ? Par hasard. J’ai pendant le confinement commandé une boîte surprise à mon libraire d’occasion préféré, Le Rêve de l’escalier, à Rouen. Et c’est lui qui a placé ce livre dans la boîte, avec d’autres. Je n’ai donc rien choisi, et j’aurais pu me retrouver avec une autre boîte. C’est ainsi qu’on découvre des choses, en suivant le mouvement.
Salut
Sur le principe , ça me fait penser à la marelle de Julio Cortazar. Tu peux lire le roman en suivant les chapitres ou … te rendre à ta librairie préférée pour poser la question