La norme et l’usage

La langue est d’abord pour moi un terrain de jeu. Le jeu de mots comme moteur d’une relation à ce qui ce dit, à ce qui nous relie, à ce qui se dévoile. Ce qui fait lien est de l’ordre de l’intime, et cela dit des choses de nous en tant que groupe, société. Nous ne pouvons pas nier là-dedans un fait politique, et c’est dès le moment où l’on choisit un dictionnaire.

Le Robert d’un côté, qui privilégie l’usage. Le Larousse de l’autre, orienté vers la norme. La norme consiste à définir ce que l’on a le droit de dire, ce qui est bien et ce qui est mal. Le mal est hors de la norme : c’est la faute de français, l’erreur de syntaxe, le mot pour un autre. La faute se heurte à la résistance de comment il faut dire, écrire, et pas autrement. L’autre façon de voir les choses : lire, écouter ce qui se dit dans les livres neufs ou dans la rue et faire confiance à ce qui vient de là.

D’une part la confiance et l’écoute, de l’autre la répression, le mépris de classe, la mainmise de l’ordre sur l’anarchie des pratiques dissonantes. Qu’on décrive ces pratiques, qu’on les valide, et l’on passe pour un laxiste adepte d’un laisser-faire qui condamne la langue à la déchéance, et, au moins, la civilisation à la disparition. Qu’on protège la langue, dans le respect des règles édictées, qu’on choisisse qu’il faut dire les choses de telle façon et pas autrement, et l’on est réfractaire au changement, un rétrograde, pire un tyran.

Cette tension entre tyrannie et anarchie empêche bientôt tout dialogue : d’invective en invective, on ne joue plus, ou ce sont des jeux de pouvoir. Soumission, insoumission traversent en lignes de force une langue condamnée au sérieux.

Attention, ce texte est avant tout un exercice d’écriture qui s’appuie sur une méthode particulière (et pas forcément visible à la lecture). Il s’agit donc d’une expérience, et non d’une prise de position. Cette expérience vise à démontrer que le texte produit pourrait tout aussi bien être un texte « normal », c’est-à-dire écrit avec un objectif communicationnel, consistant à vouloir faire passer un message. Ce texte servira d’exemple (avec explications de sa genèse) dans le cadre des formations www.ecrireclair.net

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