Journal – 15

1/2/22
Soit de l’écriture, soit de la lecture. Rarement autre chose dans ce journal qui, quotidien, souligne l’obligation d’avoir chaque jour un temps d’écriture, de lecture et de recul là dessus, même si le recul est très faible, léger, au moins avoir de quoi garder une trace. Si je n’écris ni ne lis, il n’y aura rien à dire ici et le contrat sera, provisoirement, rompu. Lecture, écriture : un simple mouvement de balancier. J’ai de quoi faire et des piles de livres à lire, des files d’auteurs dont parler, des pages blanches à noircir jusqu’à n’en plus pouvoir. Et, au moins, ces quelques lignes d’écriture du journal à donner. Le reste de la vie ? Pas ici.

2/2/22
Ce qui se retient de la rencontre en librairie avec une romancière. Les questions sur le contenu, sur l’histoire d’abord, les personnages, leur relation, mais très vite, sur la société, sur le monde, peu-être parce que le roman est ancré dans la réalité, dans l’actualité même, mais rien, ou si peu, sur l’écriture ; « ça se lit facilement », « on ne peut pas ne pas finir ». C’est un roman, mais on ne parle d’écriture que pour évacuer : l’écriture n’est pas une question, parce qu’elle n’en pose pas. Une forme d’idéal à l’écriture qui ne fait pas remarquer : c’est une idée qui m’est chère, et pourtant, ce n’est pas simple à atteindre, ça interroge. Et même pour celle qui a écrit ce n’est sans doute pas facile à atteindre. On a pu lire dans a presse que, pour son premier roman, il a fallu qu’elle dégraisse, et que donc ce qui semble si naturel à l’arrivée qu’on ne le remarque pas est bien le résultat d’un travail.

3/2/22
Publication hier en ligne de mes “27 façons de ne pas cuire un œuf », dans la revue de littérature contemporaine Dire, de François Bon, en attendant l’édition papier. C’est un pas important pour moi. C’est cela que je veux faire : écrire, chercher dans l’écriture, et proposer à la lecture. Ça n’a pas changé beaucoup ces trente dernières années. J’ai contourné l’obstacle, j’ai fait en sorte de ne pas avoir à y penser, j’ai organisé les choses pour n’avoir pas de temps à y consacrer. Il est temps que l’écriture soit placée au centre. Et ces “27 façons de ne pas cuire un œuf », c’est juste ça, placer l’écriture au centre. Plus qu’à poursuivre.

4/2/22
Journée consacrée aux étudiants, hier. Sept heures pour les faire progresser, qu’ils écrivent un peu mieux. Leur objectif est professionnel : de futurs responsables de communication. La langue comme un outil pour faire passer, au moins, des messages, et peut-être pour changer des comportements, ou provoquer des émotions. Écrire au service d’autre chose que l’écriture. Je fais de la formation depuis plus de 20 ans. Et j’ai quelques réflexes, mais toujours des surprises. “Mais vous, monsieur, vous avez mis combien de temps pour savoir écrire comme ça ?” Longtemps, ai-je répondu après une boutade du genre “j’ai toujours su”. Mais ce ni longtemps ni depuis toujours. La vraie réponse, c’est que j’apprends encore. J’aurais dû leur dire.

5/2/22
Ouvrir un livre en s’attendant qu’il fasse écho à un autre et trouver justement en exergue une phrase tirée de celui-là. Je ne sais pas si c’est très clair. Je reçois Tout l’univers, de Rémi Checchetto (sortie le 24 février aux Editions de l’Attente), pensant fortement que cela pourrait avoir un lien avec l’Autobiographie des objets de François Bon. Et la première phrase en exergue est justement tirée de l’Autobiographie des objets de François Bon (et il est question de l’encyclopédie par fascicules Tout l’Univers). Le lien que j’imaginais est là, palpable, avant même d’avoir commencé à lire le livre. C’est pile à ce moment que mon visage de lecteur marque un petit sourire de connivence. Je me précipite pour repérer dans les deux sommaires des jeux d’échos qui seraient évident. Il n’y en a pas qui me saute aux yeux. Lire, maintenant.

7/2/22
Lecture de Pyrate, de Fabrice Chillet. Un livre sur beau papier, bien imprimé chez la maison Bouclard. Une fiction ? Un récit ? J’aime cette ambiguïté. Un narrateur qui ressemble fort à l’auteur raconte les aventures d’un qu’on qualifierait de vieux loup de mer, une figure de marin buriné, revenu des tempêtes. On peut vérifier les détails dans Google, et tel personnage secondaire existe bel et bien, alors on se prend à penser que rien n’est inventé. J’aime l’idée de ce jeu entre réel et imaginaire, roman de pirate et rencontre véridique devenue livre. Je ne veux pas savoir. Ce que je lis, c’est un livre sur l’océan, sur la mer, sur l’homme qui n’a d’autre choix que se jeter à l’eau. Pyrate sort début mars. Espérons au livre une belle carrière.

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