J’ai découvert assez tardivement que la prune était un fruit qui pouvait se manger sous cette forme solide. Longtemps, pour moi, la prune a été un alcool blanc servi en fin de repas, juste après le café, entre adultes bedonnants dans la fumée des cigares, accompagné de quelques blagues salaces. Je n’ai fait le lien avec la quetsche qu’arrivé à un âge relativement avancé. Comme on nomme les choses nous empêche de percevoir la réalité des choses, et la prune aussi, après quelques verres, il faut dire. La quetsche ou la reine-claude, c’étaient donc des fruits, et la prune un alcool, et un jour, on m’a présenté une tarte aux prunes, et je croyais voir des quetsches, mais non, c’étaient bien des prunes et donc j’ai su d’où venait l’alcool. Une illumination. N’allez pas me dire que vous n’avez pas vécu de moment de ce genre : une révélation après laquelle la réalité n’est plus jamais la même qu’avant.