Des mois que personne n’avait parlé de Determ Vlodisk. À tel point que certains commençaient à oublier son visage, son odeur, l’épaisseur même de son ombre. Il ne serait bientôt plus qu’un nom qu’on finirait par oublier, et qu’on se rappellerait lors des veillées d’hiver, convoquant au lointain une silhouette et de vagues souvenirs. Pourquoi était-il parti ? Comment l’avait-on chassé ? Est-ce qu’on l’avait torturé, au moins, dans les règles de l’art ?
Il serait bientôt le nom qu’on dit parfois aux débutants qu’on veut mettre au pas. Un nom comme une menace, un nom comme une malédiction.
Mais des bruits allaient courir. Determ Vlodisk aurait trouvé refuge ailleurs, il y avait fait fortune, il y avait de l’influence. Des bruits courraient : il avait une femme intelligente, et peut-être même des enfants qui réussiraient là où bien d’autres avaient échoué. Les bruits revenaient régulièrement : Determ Vlodisk était devenu quelqu’un.
Certains se mettraient bientôt à redouter qu’on leur reproche un jour de l’avoir chassé, humilié, torturé. Certains revoyaient dans leurs cauchemars son dos plaie à vif. Determ Vlodisk revenait hanter leurs nuis, son visage barré d’un sourire figé.
Ce n’étaient pas les enfants qui se réveilleraient en tremblant au milieu de la nuit. Mais leurs parents, leurs grands-parents, celles et ceux qui avaient ri et les autres, qui n’avait rien dit, rien fait.
Determ Vlodisk était peut-être déjà là, tout près, dans un recoin sombre, et bientôt il dévoilerait leurs ignominies.